Des articles récents dans la presse locale (voir par exemple La Tribune de Genève du 12.02.25), des avertissements affichés dans les cliniques et centres médicaux de Genève ainsi que les commentaires et témoignages de patients, reflètent l’inquiétude entraînée par le coût croissant des soins et traitements médicaux en Suisse en général et à Genève en particulier. Devant cette évolution les caisses maladies réagissent en ordre dispersé, conséquence en partie, de la nature fédérale de la Suisse, qui laisse une grande latitude aux cantons dans la régulation des coûts de la santé. Cette situation a poussé certaines caisses maladies à prendre des mesures extrêmes, allant jusqu’à refuser de rembourser les traitements dans certaines cliniques et hôpitaux du canton de Genève au grand dam des assurés.
A l’encontre de ce tableau plutôt sombre, les changements qui viennent d’entrer en vigueur dans certaines dispositions du règlement de l’UNSMIS se révèlent plutôt favorables aux assurés. Par certains côtés ils peuvent être vus comme un moyen de lutter contre des mauvaises surprises amenées par le renchérissement constaté des soins. Ainsi l’Article II est modifié pour inclure les définitions de l’urgence médicale et de l’autorisation préalable. Les modifications de l’Article VIII portent sur une limitation de la couverture de soins pour les personnes protégées sur le territoire des États Unis d’Amérique qui ne résident pas dans ce pays et pour des traitements ne concernant pas les accidents ou les urgences médicales. Dans ce même Article VIII ont été supprimées les limites des prestations dans le cadre du plan complémentaire. Les annexes à cet article ont été modifiées afin, soit d’en éclaircir la portée soit de préciser les définitions ou étendre les prestations.
Une disposition du Règlement de l’UNSMIS qui n’a pas été modifiée peut se révéler d’une grande utilité mais elle est un peu cachée parmi les nombreux alinéas de l’Article VIII:
«d) Dans le cas de maladies graves ou chroniques nécessitant un traitement prolongé, le Comité exécutif peut, après consultation du médecin-conseil de l’Assurance, décider d’assouplir l’application de certaines dispositions du présent Règlement.»
Un cas récent vient soulever un problème pouvant affecter des assurés résidant en Suisse en dehors du canton de Genève. En effet, des différences notable dans la prise en charge par l’UNSMIS peuvent survenir. Ainsi, un hôpital public dans le canton du Valais a fourni un devis trop élevé, et de beaucoup, pour une intervention chirurgicale en arguant que «UNSMIS est une assurance étrangère» ce qui a provoqué la non acceptation du devis par UNSMIS et le report sine die jusqu’à présent de l’intervention prévue.
Il serait déjà choquant qu’une institution publique de santé en Suisse majore ses honoraires pour les patients dont l’assurance n’est pas locale, mais ce le serait encore plus si elle le faisait en s’appuyant sur une affirmation inexacte sur le fond et la forme.
L‘UNSMIS -dont l’acronyme anglais doit se traduire par «Assurance mutuelle contre la maladie et les accidents du personnel des Nations Unies» est, selon la présentation de son site Internet:
« … un fond multi-employeurs auto-assuré et auto-administré. Il est financé par les contributions conjointes des organisations affiliées et des membres assurés (actifs et retraités)»
et, selon ses Statuts:
«L’Assurance a son siège à l’Office des Nations Unies à Genève.»
Toujours selon les Statuts, elle a été instituée en vertu de la disposition 6.2 du Statut du personnel de l’Organisation des Nations Unies:
Article 6.2
Le Secrétaire général établit pour les fonctionnaires un système de sécurité sociale prévoyant notamment la protection de la santé des intéressés et des congés de maladie, de maternité et de paternité, ainsi que de justes indemnités en cas de maladie, de blessure ou de décès imputables à l’exercice de fonctions officielles au service de l’Organisation des Nations Unies.
Cette création a eu lieu à Genève, en 1947. Peut-on parler dans ces conditions d’une «assurance étrangère» sans autre précision?
Pour essayer de comprendre le raisonnement de l’hôpital public valaisan, il faut remarquer que chaque canton suisse peut regarder les institutions «étrangères» à son périmètre comme étrangères tout court, mais il faut se rappeler également que le terrain de la prévoyance sociale dans son versant médical est assujetti à la Loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal) de portée fédérale. En effet, la Confédération Suisse exige que tous les résidents légaux sur son territoire, suisses ou étrangers, soient affiliés à une assurance médicale répondant à des critères énoncés à minima dans la LAMal. C’est pour cette raison que quand un fonctionnaire international cesse sa vie professionnelle active et rend sa carte de légitimation en faisant la demande d’un titre de séjour ordinaire pour demeurer en Suisse, il doit accompagner cette demande, adressée à l’autorité cantonale compétente, d’une attestation, fournie par son assurance, certifiant qu’il est au bénéfice d’une couverture équivalente à la LAMal, à moins qu’il ait choisi de quitter l’assurance de son organisation pour souscrire à une assurance «locale». Cette demande est considérée comme une «requête d’exemption».
La difficulté résiderait alors dans le fait que les accords de siège conclus entre la Confédération Suisse et les organisations de la famille des Nations Unies, à commencer par l’ONU Genève, n’ont pas fait incorporer les assurances médicales établies dans leur sein au groupe des assurances locales compatibles avec la LAMal, afin qu’’aucun canton ne puisse les considérer comme «étrangères».
D’après nos dernières informations, l’UNSMIS compte négocier, en coordination avec le BIT, l’OMS et le CERN, avec ces institutions publiques de santé sises dans d’autres cantons suisses, afin d’obtenir un traitement plus équitable.
C’est sans doute une démarche raisonnable mais malheureusement aux contours indéfinis, aussi bien dans le temps que dans les objectifs chiffrables. C’est une réponse récurrente reçue souvent dans ce type de situation.
C’est pourquoi nous nous demandons s’il ne serait pas judicieux, si nous n’obtenons pas de réponse dans un délai raisonnable, d’aborder le problème sous l’angle juridique, en commençant par interroger la Mission suisse auprès des Nations Unies à Genève, point focal des relations entre les organisations établies à Genève et le gouvernement de la Confédération.
Alfredo Descalzi